Pourquoi j'aurais dû tenir un journal toute ma vie
J'ai recommencé à écrire un journal personnel régulier il y peu, et je me rends compte à quel point j'aurais dû me tenir à cette bonne habitude depuis toujours et sans arrêter.
J’écrivais mes pensées dans un journal intime pendant mon adolescence. Tu t’en souviens, de ces petits carnets avec un cadenas fantaisie ? J’y couchais absolument tous les mots qui traversaient mon esprit sans aucun filtre, avec toute ma passion et toute ma haine.
Puis, j’ai arrêté.
Récemment, je me suis dit à plusieurs reprises que j’aurais dû continuer toute ma vie, et surtout conserver tout ce que j’avais écrit, parce que ça m’aurait bien servi à plusieurs reprises !
Je me rends compte que c’est difficile de se souvenir de tout ce qu’on a ressenti au cours de sa vie (je ne vais pas mentir, avec l’âge, la mémoire est de moins en moins performante en plus…), qu’on a tendance à modifier inconsciemment nos souvenirs, à ne plus se rappeler de ce qui nous a fait beaucoup de mal, ou beaucoup de bien, d’aplanir nos expériences jusqu’à ce qu’elles deviennent floues et confuses…
Comprendre le schéma que je reproduis au travail depuis que je suis entrée dans la vie active
Depuis que je travaille, je répète toujours le même schéma : je suis hyper excitée au début, je vis ma meilleure vie pendant environ six mois, puis c’est la dégringolade. J’ai pourtant changé complètement de carrière il y a quelques années, j’ai travaillé dans plusieurs secteurs, testé différents types de postes… rien n’y fait.
Cependant, j’ai eu du mal à m’en rendre compte, et encore plus à comprendre les éléments qui me font basculer dans la deuxième phase où tout m’énerve, tout me dépite et tout m’ennuie.
La dernière fois que j’ai quitté un job pour un autre, j’ai commencé à écrire un journal quotidien pour mettre le doigt sur les éléments déclencheurs de ce basculement. Je me suis forcée à écrire même quand ça allait bien (parce que c’est utile aussi, de savoir ce qui te fait te sentir bien), chaque jour.
Si j’ai eu la bonne idée de commencer ce journal quand j’ai senti que je dérapais à nouveau, j’aurais voulu commencer bien plus tôt (pendant mes 12 premières années de travail…), car je me dis que ça aurait pu m’être utile pour choisir une direction, pour réagir plus vite aux choses qui ne me conviennent pas, pouvoir être proactive, et même pour m’en servir lors de sessions de thérapie ou de coaching.
J’ai du mal à me souvenir de mon état de santé dans le passé
Aujourd’hui, je ressens régulièrement de la fatigue, un manque d’énergie, et tout un tas d’autres symptômes imputables à tout ou rien, face auxquels personne ne sait trop quoi faire (rien d’alarmant, rien d’anormal dans mes examens, tout va bien).
Je me demande parfois si ces symptômes sont vraiment si récents que j’en ai l’impression, ou si je les ressens depuis mon adolescence. Et s’ils ont été moins présents, ou absents, au cours de ma vie, que faisais-je différemment à ce moment-là ?
J’aimerais pouvoir replonger dans mes journaux pour me rendre compte de l’évolution de ma forme et de ma santé, réaliser peut-être qu’être fatiguée fait partie de ma personnalité, que mon manque d’énergie est peut-être dû à un manque de ceci ou à un trop-plein de cela dans ma vie, glaner n’importe quel indice utile.
Ça m’aurait aidée dans mon diagnostique du TDAH et des troubles du spectre autistique
J’ai commencé à penser vraiment sérieusement que j’avais potentiellement un TDAH (confirmé entre temps) et/ou un trouble du spectre autistique (bientôt…) au cours des deux années écoulées. Malgré tout, j’ai longtemps douté, j’avais du mal à “m’auto-diagnostiquer” pour savoir si je devais aller plus loin dans les démarches.
Face à tous ces critères, j’avais du mal à me positionner. J’avais l’impression de devoir gratter ma surface pour comprendre comment je fonctionne vraiment, quand je n’essaie pas de rentrer dans les nombreux moules auxquels on doit se conformer.
J’aurais tellement aimé avoir des traces de ce qui traversait ma tête aux moments où je me livrais sans me masquer, où je n’avais pas encore travesti ma personnalité à force d’expériences négatives. Me rappeler si j’avais toujours été une pro de l’organisation, ou si c’était juste un mécanisme que j’avais développé pour ne plus vivre dans le chaos. Collecter des souvenirs oubliés de moments sociaux gênants que j’ai cachés dans un coin de mon esprit.
Maintenant que je me suis beaucoup plus documentée sur ces sujets, des souvenirs me reviennent en mémoire goutte à goutte, et les choses ont de plus en plus de sens, mais j’aurais aimé avoir cette documentation, ce petit manuel de moi-même, qu’il suffirait d’ouvrir.
Parfois, je ne sais pas quoi répondre à ma psy (ou coach)
Je ressens souvent une certaine appréhension à aller chez une psychologue ou une coach, parce que j’ai l’impression que mon cerveau est une passoire et que j’ai peur de ne pas quoi savoir dire ou répondre pendant une session.
Parfois, je me rappelle d’un événement totalement aléatoire, soudainement, au beau milieu de la nuit, alors que ça ne me sert à rien (ah, tu te souviens cette fois où tu as piqué une crise de colère parce que Géraldine a fait une blague sur le fait que tu avais pris un parapluie pour ne pas mouiller ton fond de teint quand tu étais en primaire, alors que tu ne portais pas de fond de teint et que ça n’avait aucun sens, tiens t’avais pas pleuré en piquant ta crise de colère d’ailleurs ?), et parfois, je me retrouve devant une professionnelle censée m’aider, incapable de répondre à une question simple.
Est-ce la première fois que cela m’arrive ? Est-ce que j’ai déjà ressenti ceci ? Est-ce que je peux donner un exemple de ce que j’essaie d’expliquer ? Cerveau aux abonnés absents. (Il va sans dire que je vais me souvenir de l’exemple parfait 3 jours après.)
J’ai tendance à enfouir les souvenirs des bons moments et j’ai du mal relativiser
Je suis une personne plutôt pessimiste, et une professionnelle sans salaire du scénario catastrophe et de la généralisation. Pourtant, je suis sûre que quand je me dis que “ça” a toujours mal été, j’oublie probablement toute une série de moments où “ça” s’est en fait très bien passé.
J’aimerais avoir une trace des bons moments que j’ai connus, mais aussi de mes réussites, de toutes les choses un peu folles que j’ai tentées (alors que parfois je trouve que ma vie est banale), de toutes les choses que j’ai osé faire (surtout quand je me décourage d’avance), de tous les retours positifs que j’ai reçus (en particulier quand j’ai envie de tout plaquer parce que ça ne sert à rien)…
Bref, dans un monde où j’ai du mal à relativiser, j’aimerais pouvoir consulter mes journaux comme des archives concrètes, non influencées par mon humeur du moment.
(Ceci dit, cela implique de ne pas oublier d’écrire son journal quand on est dans une bonne passe !)
Un petit mot de la fin sur le “journaling”
Ces dernières années, le fait de tenir un journal a été élevé au rang de hobby créatif, avec ses codes et ses produits. À mes yeux, le journaling a perdu de son côté pratique et/ou thérapeutique pour devenir une nouvelle tendance qui pousse à l’achat…
Alors, à toi qui hésite à te remettre à écrire juste pour toi, pour les bienfaits que cela peut t’apporter, qui n’arrive pas à te lancer car cela te semble compliqué… ne te sens pas obligé·e d’investir dans un carnet luxueux, de faire quelque chose d’esthétique, de créer des catégories et des modèles, ou que sais-je…
Pour moi, ce qui permet vraiment de bénéficier de l’écriture dans un journal personnel , c’est la spontanéité, le fait de laisser aller son stylo sans retenue, de continuer à écrire jusqu’à ce qu’on sèche. Et pour ça, pas besoin d’autocollants décoratifs ou d’une jolie couverture.
À lire aussi sur le blog : Comment éviter la surconsommation dans les hobbies
J'ai recommencé à tenir un journal il y a quelques années et si la partie "raconter ma vie à mon journal" me rebute souvent, j'adore commencer par des gratitudes. J'inscrit 3 gratitudes de ma journée. Ça m'aide à reprogrammer mon cerveau, pour voir le positif et ça me prend juste 15 minutes. En plus, ça me motive à ouvrir mon journal et souvent je prends le temps d'écrire bien d'autres choses par la suite.